Conception «La Rivière qui vient de loin»
Une création de Arielle De Garie
Mes racines ont poussé à Tewkesbury, en même temps que mes enfants, dans ce territoire qui est devenu ma terre d’adoption. J’habite dans une maison qui, par ses fenêtres, offre la rivière Jacques-Cartier en tableau. Je ne peux que me sentir concernée par l’expression et la souvenance de ces eaux.
Création de «La Rivière qui vient de loin», qui présente la mémoire de la rivière Jacques-Cartier. Cette œuvre, en art vivant et multidisciplinaire, est déambulatoire, In Situ, et se déploiera en bordure de la rivière, au Parc National.
Grâce à une bourse du CALQ (partenariat territorial), j’ai écrit un texte dramaturgique en fiction historique intitulée «La Rivière qui vient de loin». Pour les Wendats, la Jacques-Cartier se nomme Daooioli (la rivière qui vient de loin, escortée par les montagnes). Le titre fait donc écho à cette appellation autochtone. La pièce présente – à travers trois époques – l’histoire de cette rivière : 1682 (occupation du territoire par les autochtones); 1951 (la drave); et 1972-73 (la bataille de la Jacques-Cartier). Le personnage principal est Rivière, la personnification physique de l’esprit de la Jacques-Cartier. Tous les personnages sont fictionnels, c’est donc par le contexte dans lequel ils évoluent que l’Histoire de Rivière est présentée.
J’ai créé un partenariat avec le Parc national de la Jacques-Cartier (Sépaq), afin que l’œuvre puisse y être présentée sur leur territoire. Après leur avoir soumis mon texte et qu’ils en aient fait l’évaluation, mon projet a été retenu. Des ailes m’ont poussée dans le dos! À noter aussi que, pour eux : «seul le projet de Mme De Garie a atteint le niveau de professionnalisme nécessaire à nos exigences» (extrait de leur lettre).
Depuis la fin de ce printemps, l’équipe de concepteurices artistiques et moi sommes au Parc national afin de mener les explorations et recherches nécessaires pour cette création. Nous sommes donc en mesure de confirmer l’emplacement précis de la déambulation du spectacle ainsi que les périodes de représentations. « La rivière qui vient de loin » sera jouée, au KM 3 du Parc, à la brunante, de la mi-juillet à la mi-août 2023 pour un minimum de 24 représentations garanties.
RÉSUMÉ : LA RIVIÈRE QUI VIENT DE LOIN
Le spectacle s’ouvre sur une conteuse qui installe la convention… l’esprit de la rivière Jacques-Cartier est personnifié. La conteuse invite les spectateurs à prendre de l’eau de la rivière en leur disant que c’est par cette eau qu’ils auront accès à sa mémoire. C’est également la conteuse qui ferme le spectacle, en invitant les spectateurs à redonner l’eau à la rivière.
Bien que chaque époque soit présentée suivant la chronologie de son récit, les scènes s’enchevêtrent pour soutenir l’idée que la mémoire de Rivière se mélange à son propre cours.
1682
Ashakumu, un père Innu du Piékouagami (Lac-St-Jean), emprunte des sentiers près de la Daooioli pour se rendre à Wendake dans le but de trouver une femme pour son fils. Il souhaite l’empêcher de marier une blanche. Ashakumu, en colère contre sa descendance, en arrive à se confier à la rivière. À travers le rêve, elle réussit à lui faire comprendre que, comme elle, tout ce qu’il peut faire en tant que père est de soutenir la vie. Apaisé, Ashakumu retourne vers sa famille… sans jamais se rendre à Wendake. Durant ces scènes (excepté le rêve), l’ensemble des répliques du père sont dites en Innue. Celles de la rivière sont un mélange de français et de wendat.
1951
La rivière voit les bucherons-draveurs comme des surhommes, des acrobates, des musiciens. Par la drave, elle découvre des sensations qu’elle n’avait jamais encore éprouvées. La rivière se sent la maîtresse de ces hommes et s’intéresse particulièrement à deux d’entre eux : Martial et Lionel. Ces deux draveurs partagent une forte amitié, une bromance, qui se transformera, par la puissance d’une danse dans les bois, en amour. Au sortir de cet aveu, ils se refuseront néanmoins l’un à l’autre. La Rivière comme seule témoin de cette idylle. L’ivresse des bucherons fait alors écho aux vertiges vécus par la rivière à cette période de sa vie.
Le Fantôme
Encore à ce jour, plusieurs billots de drave gisent au fond de l’eau. En guise de métaphore, un joueur d’égoïne incarnera le fantôme de Rivière… venant, çà et là, à travers les époques, hanter sa mémoire.
1972-73
Marie est la secrétaire du comité pour la conservation de la Jacques-Cartier. Elle travaille avec son mari, Raymond Labrecque, et leur voisin, Jean Bédard, pour empêcher Hydro-Québec de construire des barrages sur la rivière. Elle se bat dans l’ombre, mais pour Rivière, c’est Marie la vraie héroïne de cette lutte. La rivière lui confie son destin comme si, devant elle, elle avait la vulnérabilité d’une petite sœur. Cependant, la bataille ne se déroule pas en nature, mais plutôt dans les maisons de Tewkesbury et à l’Assemblée nationale. C’est donc à travers l’eau, que Marie a puisée et qu’elle conserve dans une bouteille, que la rivière assiste à sa bataille… et à sa victoire.